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Que l’on ne s’y trompe pas. Ce n’est pas un regard nostalgique que porte Robert Voirgard sur le patrimoine industriel de la grande région à travers sa série Use Inn.

Si on peut concevoir qu’une part testimoniale participe d’une certaine manière à son approche artistique, ses œuvres ne sont qu’une réappropriation d’éléments du décor d’une vie et de son enracinement. Une matière qu’il transcende et réanime.

Car Robert Voirgard ne se sent pas chasseur d’image, il ne capture pas. Il emprunte pour prolonger le plaisir de ressentir, de comprendre et d’imaginer d’autres possibilités. S’il fige un instant, c’est pour mieux l’étirer ensuite. Son imaginaire est le seul moteur de son travail à partir de photographies numériques, de simples et inspirants pixels agencés. Comme une extension d’une première vie, celle d’ancien professeur de biologie qui aimait faire découvrir aux élèves la magie de la vie et de la multiplication cellulaire qui s’amuse aujourd’hui d’une gigantesque mosaïque de pixels, modifiés isolément ou par petits groupes, pour leur donner une nouvelle existence.

Au point que celui qui voit pratiquement du beau dans tout ce qui l’entoure, perçoit dans les vestiges de ces paquebots oxydés à la dérive une subtile alliance entre esthétisme et fonctionnalité. Alimentant tout un terreau de sensations propres à faire émerger une interprétation, de manière intuitive ou symbolique, de ce réel prêt à disparaître. Pour en modeler sa temporalité en gardant toujours à l’esprit l’état initial. Pour dégager une impression différente. Qu’il prenne ici l’usine comme un ensemble, ou là qu’il en isole un morceau pour le démultiplier à la façon de blocs de légos.

Robert Voirgard se joue des lignes, des formes, des volumes, des couleurs, des reflets, des symétries, des cadrages, des plans, des contrastes pour envisager de nouveaux traits de constructions. Et décliner autant de nouveaux terrains fertiles, façon cabinet de curiosité.

S’il peut laisser filer sa créativité jusqu’à flirter avec l’abstraction, il a choisi de proposer majoritairement la part la plus réaliste de son travail autour de Use Inn pour cette exposition au sein de la galerie l’Art dans le Musée – Parc Explor Wendel.

Pour relier la matière historiquement extraite du site aux structures de métal – dont celles de Völklingen – qui l’utilisaient pour en façonner de nouvelles.

Une manière allégorique de souligner sa propre démarche.

Christophe Prévost – commissaire d’exposition